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27 avril 2007

Le mystère de mon paternel (partie 39)

Puis, mon père reprend sa narration :

« Et puis alors que je préparais mon retour, j’ai eu des nouvelles des personnes que j’aimais ici. Une grande partie du réseau avait été démantelé. Des centaines d’arrestations. Mon oncle, mes amis se sont retrouvés derrière les barreaux. C’est avec l’aide d’Aileen que j’ai pu revenir. Avec son aide également que j’ai pu faire évader un bon nombre de mes amis. Je me suis retrouvé de nouveau en meneur d’hommes, en chef de guerre. Je me suis plongé dans la lutte pour vous oublier, toi et ta mère. Je me suis fait happer par cette époque de lutte, cette époque sanglante. Je suis devenu plus dur, plus méchant. Chaque coup que l’armée Anglaise nous donnait lui était rendue. Faire que l’Irlande du Nord soit de nouveau unifiée avec l’Eire était devenu ma raison de vivre. J’ai remonté un réseau, assemblé de nouveau des partisans. Mais en 4 ans d’absence, bien des choses avaient changées. La haine envers l’Angleterre dont je me nourrissais grandissait au fur et à mesure des batailles et des actions de répressions. Je me suis laissé entraîner dans cette lutte, submerger totalement. Ensuite, sont arrivés les drames dont Aileen a déjà du te parler. J’ai perdu ceux que j’aimais, j’ai perdu ma famille comme j’avais abandonné ma femme et mon fils. Maintenant, je continue cette lutte parce que c’est tout ce qu’il me reste. Parce qu’elle est devenue ma compagne de chaque jour. Alors tu n’as pas de morale à me faire. Je sais ce que je suis. Je sais comment je le suis devenu. Je ne le sais que trop. »

Je sais pourquoi il est ainsi. Maintenant que les pièces du puzzle se mettent en place, je comprends. Enfin, il reste quand même cette part de moi qui se place en victime et qui lui en veut. Car je lui en veux de nous avoir abandonné ma mère et moi. Et je reste quand même persuadé qu’il y avait d’autres solutions. Je ne peux ôter cette sensation, cette idée qu’il a choisi la facilité et la fuite. Que s’il en avait parlé à ma mère, à eux deux, ils auraient trouvé une solution. En fait, j’analyse mon ressentiment comme un constat d’échec en quelque sorte. Car j’ai compris qu’il ne viendrait pas avec moi en France. Je ne sais pas vraiment si c’est réellement ce que j’espérais, mais je prends cela comme un demi échec par rapport à ce que je suis venu chercher ici. Certes, j’ai mes réponses. Certes, Henry est dans les faits et dans mon cœur comme un père. Certes, après 17 ans d’attente, 17 ans sans cet homme dont le sang coule dans mes veines, je l’ai retrouvé. Mais est ce pour mieux le perdre ? Est-ce juste pour avoir une discussion comme celle-ci ? Même pas une discussion de père à fils car nous n’avons là qu’une discussion d’homme à homme. Chacun avec sa vie, avec son passé, avec ses espérances. Je me rends compte que si lui a été égoïste en partie, je le suis moi aussi maintenant. Comment pourrais je en vouloir à un homme qui a sacrifié son bonheur pour protéger et sauver ceux qu’il aimait ? Comment en vouloir à un homme qui a tout perdu et n’a plus, comme point de repère, que la violence d’une lutte qui dure depuis près de 80 années et qui ne mènera probablement à rien ? Comment ais je pu penser une seconde qu’un homme qui s’est plongé dans la violence ainsi, capable de tuer, pouvais tout arrêter et venir avec moi en France ? Et tout cela sans penser une seconde à ce qu’Henry peut bien penser, ressentir. Il est venu avec moi dans cette aventure et pourtant, c’est pour retrouver celui que ma mère a aimé avant lui.

Le silence a de nouveau pris le dessus.

« Je comprends. Je sais maintenant ce qu’a été ta vie. Je sais combien tu as pu souffrir. Mais tu sais que nous sommes là maintenant. Je sais que ton monde est loin de celui que tu aurais pu avoir si tout ne s’était pas passé comme cela s’est fait. Mais quoi que tu en dises, maintenant tu sais que je suis là. Penses tu vraiment que cette guerre mènera à quelque chose ? Je sais que cette lutte est tout ce que tu penses encore avoir. Je sais que tu t’y accroches comme un rocher. Mais je crois que ce n’est pas cet univers de guerre, que tu ne connais que trop bien qui pourras t’apporter ce bonheur que tu recherches. Je crois qu’il y a maintenant une autre solution. »

« Je ne sais pas s’il y a une autre solution. J’ai perdu ta mère, j’ai perdu ceux que j’aimais. J’ai perdu tant de choses que cette lutte est devenue la seule chose qui me reste. Je ne suis plus qu’un guerrier. Je suis recherché par la police et l’armée. J’ai blessé et tué. Je ne sais pas si j’ai droit au bonheur. Du moins, je n’y crois plus. »

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Commentaires
J
Oh ce n'était pas le laconisme qui m'interpellait, juste de la curiosité. J'espère que la suite te plaira toujours. Au plaisir de te lire.
M
J'ai eu un frisson en lisant et parcourant ton blog, l'ambiance, les textes alors ce "brrrr!!!" symbolise mon ressenti, je reviendrai avec un peu moins de laconisme la prochaine fois ;)
J
à Nannouch: Curieuse... Et bien va falloir attendre pour savoir.<br /> <br /> à M'damme: pourquoi brrr ?
M
brrrr !!!
N
Tu m'étonnes que tu t'en est rendu compte plus tard ^_^<br /> <br /> <br /> C'est que t'as toutes les infos d'un coup, et pas le temps de trop les digérer... ni de prendre un peu de recul.<br /> <br /> <br /> Je me demandais : tu as vu ton père cette fois là, mais l'as-tu revu depuis ou bien ne vous êtes vous plus jamais recroisés ?
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