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26 avril 2007

Le mystère de mon paternel (partie 38)

« Je suis venu en France suite à un attentat qui avait tué un enfant parmi 11 victimes. J’ai compris à ce moment que nous étions allé trop loin. Je suis donc parti, je ne voulais plus être actif, je ne voulais plus rien avoir avec la cause. Je suis venu en France. Pourquoi avoir fuit l’Irlande ? Parce que tout simplement, les autres ne voulaient pas me laisser stopper. J’étais l’un des meneurs, l’un des membres les plus actifs. A cette époque, l’IRA perdait de plus en plus de membres, soit parce qu’ils faisaient sécession et créaient des mouvements dissidents, soit parce qu’ils se rangeaient. Je me suis donc installé à Paris. J’effectuais des petits boulots. J’ai rencontré ta mère dans un pub. Je ne voulais pas m’attacher, mais elle a voulu me dessiner, me peindre. Petit à petit, à force de nous voir, nous sommes tombés amoureux. Je savais que les autres n’étaient pas loin. J’ai poussé ta mère pour que l’on s’éloigne de Paris. Nous nous aimions vraiment. Mais chaque fois que je sortais avec elle ou seul, je devenais parano. Nous nous sommes mariés l’année de notre rencontre. Puis, ta mère est tombée en ceinte. J’ai alors été contacté par des amis depuis l’Irlande qui m’ont prévenu que ceux de l’IRA étaient sur ma piste. Je pressais de plus en plus ta mère pour partir de Paris, donnant tous les prétextes possibles. Nous avons finalement convenu de partir après ta naissance. Deux semaines avant ta naissance, j’ai… été contacté par l’IRA. Ils m’ont laissé un message facile à comprendre. Soit je rejoignais de nouveau la cause, soit ta mère et toi disparaissiez.

Et puis tu es né. Nous sommes parti nous installer en Normandie. Ce fut la meilleure chose. Ils ont perdu ma trace. Nous avons vécu comme un couple normal, loin de tout. Ce furent des mois de plaisir, de bonheur. Une vie normale, une vie à laquelle j’aspirais de tout mon cœur. Te voir grandir, vivre avec vous, avoir l’amour de ta mère étaient les meilleures choses qui m’étaient arrivés depuis longtemps. Petit à petit, je me suis fait à cette vie simple. Je faisais des petits boulots, me servant de mon habileté à réparer les objets. Je retapais les meubles, réparais les postes radios, faisais de petits travaux. Ta mère peignait et vendait ses toiles. Nous nous débrouillions. Sauf que forcément, mon passé m’a rattrapé. Un jour, une lettre est arrivée. Je l’ai prise sans que ta mère ne la voit car sur l’enveloppe, il y avait un code. Une date exactement. La date du Bloody Sunday, le 30 janvier 72. Cette date est gravée dans ma mémoire mais aussi dans ma chair, au plus profond de moi. Donc, cette date signifiait que la personne qui avait envoyé cette lettre savait qui j’étais et qu’elle savait ce que cette date représentait. Je suis parti ce jour là. Je me suis isolé toute la journée dans les grottes des falaises afin d’être abrité de la pluie et du vent de novembre. J’ai lu et relu cette lettre. J’ai beaucoup réfléchit avant de la déchirer et de la jeter à l’eau. Ma décision était prise. Tu veux savoir ce qu’il y avait dans cette lettre ? Tout était écrit en Gaélique Irlandais. Il n’y avait pas grand-chose d’écrit dessus. Juste quelques mots : Nous savons. Tu dois revenir et te battre à nouveau. Sinon, toi et les tiens porterons la marque noire de l’Oglaigh na Heireann. »

Il fait une pause. Je l’ai laissé parlé. Sa respiration s’est accélérée. Se remémorer ces moments d’une autre vie, la vie qu’il aurait aimé vivre lui fait mal.

« Et à part le fait qu’ils t’aient retrouvé, ça veut dire quoi tout ça ? »

« La marque noire, c’est la cagoule. La cagoule des condamnés à mort de l’IRA. Et l’Oglaigh na Heireann c’est le nom Gaélique de l’IRA. Ce qui voulait dire que c’était quelqu’un d’influent au sein de l’organisation qui m’envoyait ces menaces. Ce qui voulait dire que vous étiez en danger et que vous le resteriez ta mère et toi tant que je ne serais pas rentré au pays et que je n’aurais pas repris les armes. Du coup, ma décision fut prise rapidement. Il m’a fallut préparer mon départ, reprendre contact avec des amis, avec ma famille et ensuite, je vous ai laissé. Lorsque je suis rentré ici, en si peu de temps, bien des choses avaient changées. »

Un lourd silence s’impose alors. Sa respiration s’est calmée. Il a repris le contrôle. Un masque dur s’est de nouveau formé sur son visage. Il a ouvert les yeux et me regarde, de son regard gris. Le même regard que moi.

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Commentaires
J
à 4: Mais j'espère bien. ;-)
J
à Nannouch: C'est sur qu'à partir du moment où il n'a pas vraiment choisi ce qui est arrivé, cela lui a fait mal de s'en souvenir.
4
(j'ai hâte de lire la suite....en toute sincèrité)
N
Tout ceci explique bien des choses... Notamment pourquoi le pourquoi des "accidents" qui sont arrivés autour de lui (des actes manqués tant il ne voulait pas être là ni faire ce qu'il faisait... certainement pas voulus ces accidents, bien au contraire) et le pourquoi de ce durcissement qui éloigne pratiquement toute sa famille irlandaise de lui à ce moment là.<br /> <br /> C'est sûr que ça devait être difficile pour lui de te recevoir, de se remémorer tout ça... De quoi le rendre fou. Se prendre en pleine face que ça fait 17 ans qu'on fuit le bonheur, 17 ans de perdus dans sa vie pour des erreurs de jeunesse qui nous ont rattrappé... <br /> <br /> Je comprends qu'il se soit mis en colère, autrement il se serait sûrement effondré.
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